Devançant la saison des prix littéraires, celle des palmarès d’universités a commencé, et les gazettes s’en disputent la primeur : à la fin août était diffusé le classement QS (Quacquarelli Simmons)[1] ; aujourd’hui paraît le classement THE (Times Higher Education)[2] ; après la mise en ligne du classement de Shanghai 2010, nous aurons, à la fin du mois, une version Beta du concurrent « multidimensionnel » européen U-Multirank, construit pour contrecarrer tous les autres. Cette folie des palmarès nous interroge sur sa signification profonde. Les critiques méthodologiques ne manquent pas et on pourrait se contenter de relever un certain manque de crédibilité intellectuelle de ces classements, et surtout de leurs utilisateurs. Mais l’impact en termes d’image est important, et « il faut faire avec ». Comme pour les prix littéraires qui boostent les ventes de livres, les palmarès d’universités vont influer sur les fonds publics et privés que recevront les établissements.
Nous ne reviendrons pas sur l’analyse critique que nous avons faite des palmarès, et notamment du classement de Shanghai[3]. Interrogeons nous plutôt sur la signification de la « course à l’excellence » qui accompagne cette floraison de classements internationaux aux critères fluctuants.
Le fait est qu’on entend beaucoup parler d’excellence en France (pôles d’excellence) comme dans d’autres pays (initiative d’excellence en Allemagne) ou à l’échelle européenne (centres d’excellence). Le rapport Aghion[4], fait à la demande de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, explore la problématique de l’excellence. Il y est beaucoup question « d’excellence académique » sans que ce concept soit clairement défini. Mais on nous dit : « conscients du risque de décrochage, l’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Union européenne ont mis en place des initiatives d’excellence qui présentent des caractéristiques communes : focalisation forte de financements pluriannuels sur l’excellence pour renforcer compétitivité et attractivité… ». Ceci renvoie à la « stratégie de Lisbonne » et à l’objectif de faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ».
Dessin par Georges Waysand