Archive for the 'Etudes, Rapports' Category

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Election sujet à réflexion (suite)

Il y a quelque temps, alors que se préparait l’élection présidentielle, les questions universitaires étaient un peu à l’ordre du jour lorsqu’il s’agissait de comparer les programmes[1]. Après l’élection d’Emmanuel Macron il s’est plutôt agi de donner une bénédiction à des candidats, pour la plupart nouveaux, qui se réclamaient du président, face aux anciens partis en déconfiture. En particulier il ne fut plus guère question de l’enseignement supérieur. Il faut dire que les projets de réformes qui avaient circulé n’avaient pas suscité une large adhésion du milieu universitaire. Les critiques étaient nombreuses et c’est un silence un peu ambigu qui domine aujourd’hui, en attendant la suite.

Depuis quelques mois notre pays est entré dans une zone de turbulences politiques assez nouvelles qui échappent aux analyses traditionnelles. Il ne s’agit pas d’un simple rééquilibrage des partis politiques. En France on voit le raz de marée d’un mouvement qui n’existait pas il y a peu, et qu’on ne peut caractériser par un programme bien établi. Si l’on veut comprendre comment tout ceci peut évoluer, il faut commencer par noter le chiffre considérable de l’abstention aux élections législatives qui a dépassé 57% au second tour (65% des 18-24 ans). Ceci relativise les résultats arithmétiques et met en évidence une rupture profonde de notre société. Le succès massif mais tout relatif de « La république en marche » s’inscrit dans ce contexte. Il a le visage d’un électorat plutôt aisé qui se rallie au style du nouveau président plutôt qu’à des projets bien définis, tandis qu’une majorité populaire reste à l’écart.

Si nous regardons ailleurs, nous verrons de pareilles contradictions. Ainsi, aux USA, « The Institute for new economic thinking »(INET)[2] analyse la situation politique actuelle et montre que le pays est aujourd’hui divisé en deux blocs : l’un d’environ 20% qui se situe au cœur de la société technologique, avec une formation universitaire et des perspectives d’avenir ; l’autre c’est celui des bas salaires, des jobs incertains et des dettes. Voir l’article « America is regressing into a developing nation for most people ». Cette société duale est le résultat d’une longue dégradation de la condition de la classe moyenne blanche depuis la seconde guerre mondiale. A l’occasion de la dernière élection présidentielle américaine, cette classe moyenne de « blancs mal payés » s’est faite entendre et a pesé sur les résultats électoraux.

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Election sujet à réflexion

A deux semaines de l’élection présidentielle, la gauche étant en miettes, le vote va se jouer entre trois candidats : Le Pen, Fillon et Macron. Si Le Pen était élue, ce qui est peu probable, le devenir de l’enseignement supérieur deviendrait un sujet préoccupant. Pour ce qui est de Fillon, s’il gagnait, sa politique universitaire serait un compromis plus réactionnaire que moderniste, à l’image des forces qui le soutiennent. Reste l’hypothèse Macron dont les options ne sont pas l’expression pure et simple de forces politiques préexistantes dont il serait le leader. Certains, comme le groupe Jean-Pierre Vernant, le voient comme l’expression catastrophiste de lobbies néo-libéraux. Mais d’autres, comme le « communiste »  Patrick Braouezec, maire de Plaine-Commune, se rallient à lui. Celui-ci écrit dans Le Monde du 7 mars 2017 : « Ma proposition est sans doute symptomatique de ce monde actuel décrit par Edgar Morin comme « un monde contradictoire, complexe, incertain ». Le projet d’Emmanuel Macron assume ces trois caractéristiques. C’est aussi son mérite, sa force et son intérêt ». 

Le débat autour de la candidature Macron est intéressant, en effet. Mais on peut se demander, au cas où il serait élu, s’il existerait des forces politiques solides et pérennes capables de soutenir ses projets. Au demeurant, ceux-ci ne sont pas toujours stables et clairs[1]. Ils sont élaborés par des comités de jeunes technocrates intelligents qui vivent un peu en état d’apesanteur, n’étant pas les porte-paroles de partis politiques préexistants. Les affirmations les plus fortes n’engagent pas des forces de terrain. Cependant, dans l’immédiat, il est intéressant de participer au débat d’idées que Macron lance ou qu’il accompagne. Nous en ferons ici une première analyse dans le domaine qui nous intéresse : l’enseignement supérieur.

La déclaration liminaire de son programme, diffusée par son comité, paraît offensive. Il nous dit : « Le succès dans l’enseignement supérieur en France reste profondément inégalitaire. Cela a des retombées directes sur la mobilité sociale et sur le marché du travail. (..) Notre système court un risque de relégation par rapport à la circulation mondiale des étudiants et des chercheurs, et il n’a pas su générer jusqu’ici un pôle d’innovation comparable à la Silicon Valley ». Mais la conclusion principale en est que « pour inverser la tendance, cela passe par l’autonomie qui existe dans la loi, mais qui est largement restée lettre morte sur le terrain ». Cela ne suffira pas à corriger les inégalités, et pourrait même les accroître, car l’absence de règlementations les favorise.

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Un manifeste européen pour l’évaluation de la recherche

C’est à la suite de la 19ème conférence internationale sur les indicateurs en science et technologie, qui s’est tenue à Leiden (Pays-Bas) en septembre 2014, qu’a été publié un « manifeste pour la mesure de la recherche »  C’est la première fois que des experts appartenant aux observatoires scientométriques européens publient un tel document qui se veut une plateforme pour l’évaluation de la recherche, au terme d’une réflexion engagée depuis plusieurs années, notamment en France par l’OST. Ce manifeste formalise des critiques sur la bibliométrie qui a pris une telle importance depuis quelques années dans la conduite et le financement de la recherche et propose d’en tenir compte dans le travail d’évaluation. Ces critiques ne sont pas nouvelles[1], mais elles s’accompagnent ici de propositions pour les méthodes d’évaluation et le travail des experts.

Le constat qui est fait est que « les évaluations ne sont plus fondées sur des réflexions mais sur des indicateurs » et les rédacteurs ne craignent pas d’affirmer : « Nous avons observé avec une inquiétude grandissante le mauvais usage des indicateurs dans l’évaluation de la performance scientifique ». Le manifeste propose « un condensé des bonnes pratiques » et formule dix principes qui paraissent à la fois raisonnables et ambitieux. L’application pratique de ces principes reste le plus souvent à préciser. Cet article est un commentaire critique des propositions de ce manifeste, qui souligne seulement quelques questions auxquelles il faudrait répondre pour rendre ces propositions moins théoriques.

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La sélection à l’université : un engagement de réussite

C’est le titre de la dernière note publiée par le pôle “Enseignement supérieur Recherche” de Terra Nova, dont je reproduis ici la synthèse :

S’il est bien un débat ancien concernant l’organisation de nos universités, c’est celui de la sélection à l’entrée à l’université, qui est en discussion depuis la deuxième démocratisation de l’enseignement supérieur des années 1960, et de la sélection à l’entrée du cycle de master qui est en discussion depuis la mise en application de la réforme LMD au début des années 2000. Mais si le débat a été tranché jusqu’ici par la décision politique du maintien du baccalauréat comme seule condition d’accès à l’université, force est de constater que le système a très profondément évolué, accordant une place croissante aux filières sélectives (classes préparatoires, grands établissements… mais aussi sections de techniciens supérieurs et instituts universitaires de technologie) qui attirent maintenant la moitié des bacheliers généraux ; l’inachèvement de la réforme des masters, en maintenant leur découpage en deux années bien distinctes, avec sélection possible à l’entrée en deuxième année, empêche la création de cursus cohérents. En bref, la « victoire » des opposants à la sélection est une victoire à la Pyrrhus, qui bloque le développement d’une offre universitaire démocratique et de qualité, fonctionne au profit des filières sélectives des Grandes écoles.

Les propositions que nous formulons visent à

- augmenter le nombre de jeunes obtenant un diplôme d’enseignement supérieur,

- lutter contre les déterminismes sociaux de l’orientation,

- diminuer le taux d’échec à l’université.

C’est sur la base de ces objectifs que nos proposons de généraliser la sélection à l’entrée dans l’enseignement supérieur, ceci n’ayant pas pour but d’éliminer, mais dans une perspective d’une orientation plus efficace et plus juste, sans remettre en cause le droit de chaque bachelier à poursuivre des études supérieures. Nous pensons que la sélection à l’entrée en Master serait seule à même d’apporter une véritable cohérence à ces cursus, leur permettant de sortir par le haut de la concurrence stérile et déséquilibrée entre universités et écoles. 

Avec 43% d’une classe d’âge obtenant un diplôme d’enseignement supérieur, la France se situe au dessus de la moyenne des pays de l’OCDE (39%), mais légèrement en dessous en ce qui concerne les diplômes de type licence universitaire ou plus : 27% en France contre 30% en moyenne OCDE. Il y a donc du chemin à parcourir pour atteindre, puis dépasser l’étape de 50% d’une classe d’âge avec un diplôme d’enseignement supérieur !

Aujourd’hui, les filières sélectives à l’entrée sont plus attirantes, accueillant à peu près la moitié des bacheliers généraux, et ceci entraîne de fortes distorsions d’orientation, et une équation impossible à résoudre pour assurer la réussite dans les filières universitaires.

La sélection que nous proposons d’instaurer à l’entrée à l’université devra respecter un certain nombre de conditions : diversité de l’offre universitaire, tant pas ses objectifs que par les rythmes de progression, développement des possibilité de reprise d’études, diversité des critères de sélection au lieu de l’actuel critère unique de l’excellence scolaire, régulation par l’Etat et au niveau régional. Cette sélection doit être comprise comme un contrat passé entre un étudiant et l’institution qui l’accueille : l’étudiant, en faisant acte de candidature, marque son engagement dans le cursus qu’il va suivre ; l’institution, en acceptant l’étudiant,  s’engage  donner à l’étudiant les conditions de sa réussite.

Nous souhaitons également voir s’instaurer une sélection à l’entrée en master, plutôt que l’absurde sélection actuelle, autorisée au milieu des études de master. Ceci aura pour effet d’achever la transition vers des cursus de master cohérents en deux ans, donnant une formation bien plus solide que dans la situation actuelle où le renouvellement des étudiants à mi parcours oblige à une mise à niveau au début de chaque année ; elle permettrait aussi d’inclure entre les deux années de master un stage long et la possibilité d’une année de césure analogue à ce que pratiquent les écoles. Enfin, elle mettrait les masters universitaires à parité avec les écoles dans le choix des étudiants sortant de licence : dans un cas comme dans l’autre l’étudiant saurait que son admission dans le cursus choisi lui donnerait des chances très fortes de réussite au diplôme.

La situation actuelle, véritable échec démocratique, porteuse de conséquences sociales et économiques néfastes, voire inquiétantes, montre qu’il est plus que temps d’avancer sur le dossier de la sélection universitaire. Affirmer un principe de sélection à l’entrée de tout cycle universitaire, c’est avant tout se forcer à réfléchir au sens de ces cursus : d’où partent les étudiants et où veut-on les amener ? Quels sont leurs objectifs, les notions et compétences qu’ils doivent acquérir ? Quels outils mettre en place pour assurer une bonne insertion professionnelle à l’issue de chacun de ces diplômes ? Une décennie après la mise en place du LMD dans les universités françaises, il est temps d’assumer une différenciation des objectifs du Baccalauréat, de la Licence, et du Master, et d’en tirer les conséquences en termes d’entrée dans les différentes filières. Sans remettre en cause le droit aux études supérieures, la sélection est un outil qui responsabilise les étudiants et les établissements autour d’un objectif de réussite du plus grand nombre.

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Polytechnique : un cas d’école

Le système d’enseignement supérieur français devra changer profondément s’il veut rejoindre le modèle international, ou alors il demeurera un système exotique avec sa dualité universités-grandes écoles : d’un côté des universités libres d’accès, de l’autre des écoles  sélectives. De ce point de vue il est n’est pas inutile de se pencher sur le cas de l’Ecole Polytechnique, en dépit de sa grande singularité, pour mieux comprendre les blocages du système.

Une récente étude dont Le Monde se fait l’écho[1], souligne le caractère socialement hyper-sélectif du concours d’entrée à L’Ecole Polytechnique. Ce n’est pas une surprise, mais la situation s’aggrave au fil des ans. Les trois-quarts des admis sont parisiens et, sur les 401 élèves de la promotion 2014, 152 proviennent de deux lycées ! Les provinciaux constituent aujourd’hui un quart des admis alors qu’ils étaient encore un tiers en 2006. Quant aux boursiers, leur pourcentage stagne à 13% contre 35% à l’université. Il est assez remarquable que leur taux d’échec à l’oral soit bien supérieur à celui des non-boursiers, ce qui confirme le caractère social de la sélection. A la fin on a une minorité uniforme et unicolore qui a pour base moins de 10% de la population[2]. Quand on y regarde de plus près, on est surpris du nombre d’élèves qui comptent une ascendance polytechnicienne. Au rythme où vont les choses, la « noblesse d’Etat » deviendra héréditaire. Sombre conclusion pour une école née avec la révolution française.

Dans un article antérieur, je présentais la sélection comme un instrument positif qui peut orienter les étudiants vers les études auxquelles ils sont le mieux préparés, l’idée étant que cette sélection vienne servir les études auxquelles elle introduit. En somme, on sélectionne pour la suite. Mais ce n’est pas du tout le cas de Polytechnique aujourd’hui. Ce qui compte c’est le concours d’entrée, ce n’est pas ce qu’on apprend ensuite.

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Neuf idées pour redonner confiance aux universités et aux universitaires

C’est le titre de la dernière note publiée par le pôle “Enseignement supérieur et Recherche” de Terra Nova, dont je reproduis ici la synthèse : 
Dans l’ambiance actuelle d’extrême lassitude et de défiance du monde universitaire, il devient essentiel de sortir du seul discours critique et des généralités. C’est pourquoi, sans prétendre à l’exhaustivité, Terra Nova met à la discussion neuf mesures dont nous pensons qu’elles peuvent aider à lever les blocages du système d’enseignement supérieur français, et en particulier de ses universités. Si le débat public n’est pas avare de critiques de toutes sortes, il évite trop souvent d’affronter ces blocages, comme s’ils étaient inébranlables, alors même qu’ils plombent les possibilités de reconstruire la confiance et d’aller de l’avant. Nous présentons les bénéfices qu’étudiants, universitaires, établissements et système dans son ensemble pourraient attendre de ces mesures, ainsi que les conditions pour qu’ils adviennent.
  1. Parce que tous les étudiants ne se destinent pas à obtenir un master, et parce que tous les bacheliers peuvent prétendre à accéder à l’enseignement supérieur, il importe de diversifier l’offre de parcours pour répondre à la diversité des publics de licence, sans pour autant céder au fantasme de l’adéquation entre formation et emploi. La diversification fera sens si elle affiche clairement les prérequis de chaque parcours, ses objectifs de formation et ses débouchés. Cette disposition de bon sens - qu’exclut pourtant explicitement la récente loi - est la condition pour “arrêter le massacre” des étudiants affrontés à des formations qui ne répondent pas à leurs intérêts. C’est aussi la condition pour que – cas à peu près unique au monde - les meilleurs étudiants cessent de contribuer à dévaloriser l’université en la fuyant. C’est enfin une condition pour stimuler l’engagement des enseignants en licence.
  2. Le LMD a été créé pour offrir une formation modulaire par capitalisation de crédits, permettant d’introduire de la flexibilité dans les parcours et les rythmes des divers publics étudiants. Il est urgent de mettre réellement en œuvre cette politique, ce qui suppose de donner aux établissements l’autonomie pédagogique dont ils jouissent dans d’autres pays, plutôt que de les enfermer dans des cadres rigides qui figent les conditions d’apprentissage.
  3. L’autonomie pédagogique doit permettre de valoriser les atouts scientifiques spécifiques à chaque université en master et en doctorat. Il est essentiel de donner aux acteurs la possibilité de les identifier au sein de domaines génériques, plutôt que de les enfermer dans un cadre réglementaire étroitement contraint, qui rabote l’originalité, empêche de capitaliser les réputations, décourage l’initiative et fait obstacle à la réactivité indispensable de la formation au mouvement des sciences et des techniques. Cette valorisation profiterait du respect porté à l’esprit du Master comme formation intégrée de deux années, et de la possibilité d’organiser des offres thématiques en “écoles universitaires de recherche”.
  1. Si l’on veut que les universités innovent sur le terrain pédagogique, les bonnes paroles ne suffisent pas. Il faut que les établissements puissent réorganiser leurs cursus et élaborer des dispositifs de contrôle de connaissances en fonction de la diversité des étudiants, et des rythmes de formation qu’elles offrent. Là encore, il s’agit d’autonomie dont les termes doivent être élaborés et surveillés par les instances locales de l’établissement. Il faut aussi revoir les modèles d’allocation des ressources pour encourager l’initiative.
  2. La contrepartie de l’autonomie est évidemment la régulation par l’évaluation. Le nouveau Haut Conseil de l’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur doit poursuivre la tâche de l’ancienne AERES en évitant les écueils de la pensée unique. Une façon simple d’y parvenir est d’autoriser les établissements à recourir aux institutions d’évaluation de leur choix dans l’offre accessible en France et en Europe. S’il convient de ne pas revenir sur l’abandon des cotations, il importe tout autant de ne pas interdire aux établissements qui en feraient le choix d’y recourir.
  3. Les lois successives s’entêtent à imposer aux universités un modèle unique de gouvernance qui est inégalement adapté aux caractéristiques de chacune d’entre elles. Il faut rouvrir la voie proposée par le code de l’éducation, qui permet d’expérimenter de nouveaux statuts. Les universités qui le souhaitent pourraient ainsi par exemple prendre l’initiative de distinguer plus nettement ce qui relève des affaires académiques de ce qui est du domaine de la gestion stratégique.
  4. Pour ce qui est de la structuration des sites, plutôt que d’imposer les alliances et leurs périmètres, il faudrait considérer les nouveaux outils comme des ressources à la disposition des acteurs de terrain. C’est évidemment la seule façon de favoriser des alliances qui seront solides parce qu’elles feront sens, pour avoir été concertées localement, dans une perspective stratégique de simplification et non d’empilement institutionnel.
  5. Les universités doivent clairement revendiquer leur vocation d’excellence, mais revendiquer dans le même mouvement la multiplicité de leurs excellences sur tout le spectre de leurs compétences effectives - excellence en recherche, en formation, en construction de partenariats divers, etc. Plutôt que de disqualifier un grand nombre d’universités au nom de l’excellence de la recherche de quelques unes d’entre elles, l’acceptation de la diversité des établissements transformerait une politique des bons sentiments, en fait profondément inégalitaire, à une politique plus ouverte et plus fluide de formation des élites.
  6. La question du financement est évidemment centrale. Il faut chercher des solutions au sous- financement chronique de nos universités, sans nous cacher derrière notre petit doigt. Demander l’augmentation des dotations de l’état est nécessaire mais très insuffisant, en particulier dans un contexte budgétaire très contraint. Il convient donc de mieux faire comprendre l’importance de l’université par l’opinion publique et les décideurs, de trouver les solutions d’une gestion stratégique mieux maîtrisée des ressources dont disposent des établissements, et d’explorer - sans tabou et dans une perspective progressiste - les voies de diversification des financements, par les mécénats, la valorisation de la recherche et de la formation, et les droits d’inscription. Une conférence de consensus pourrait être organisée sur ces sujets controversés. 
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La France au top ? Rien n’est moins sûr

On a beaucoup critiqué les classements internationaux d’universités, et à raison pour leur méthodologie très discutable[1] – à tort aussi parfois lorsque les critiques étaient surtout motivées par le désir de justifier les résultats médiocres des universités et écoles françaises. Le propos de ce court article est différent : prenant les classements pour ce qu’ils sont, il s’agit pour nous d’analyser un nouveau classement paru récemment, le classement « Alma Mater Index Global Executives »  du Times Higher Education (THE) et d’en tirer quelques remarques comparatives sur le recrutement des élites en France et dans les autres grandes puissances économiques, et tout particulièrement sur la place de la recherche dans les institutions y formant les élites[2].

Ce classement (ci-dessous dénommé « THE Alma ») répond à la question très simple suivante : Dans quelles universités les dirigeants des plus grosses entreprises mondiales ont-ils fait leurs études ? Les auteurs de cette étude ont donc pris en considération les 500 plus grosses entreprises mondiales, telles qu’elles sont répertoriées par le magazine Fortune dans son classement « Fortune Global » et ont répertorié la ou les universités où leurs PDG avaient fait leurs études (très souvent, les dirigeants ont deux diplômes, une licence (Bachelor) puis un master (par exemple un MBA). Par rapport aux autres classements, celui-ci a l’avantage d’une méthodologie transparente. Pour notre analyse sur la place de la recherche, nous avons utilisé, faute de mieux, les classements (contestables) existants.

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De l’excellence en milieu universitaire

Devançant la saison des prix littéraires, celle des palmarès d’universités a commencé, et les  gazettes s’en disputent la primeur : à la fin août était diffusé le classement QS (Quacquarelli Simmons)[1] ; aujourd’hui paraît le classement THE (Times Higher Education)[2] ; après la mise en ligne du classement de Shanghai 2010, nous aurons, à la fin du mois, une version Beta du concurrent « multidimensionnel » européen U-Multirank, construit pour contrecarrer tous les autres. Cette folie des palmarès nous interroge sur sa signification profonde. Les critiques méthodologiques ne manquent pas et on pourrait se contenter de relever un certain manque de crédibilité intellectuelle de ces classements, et surtout de leurs utilisateurs. Mais l’impact en termes d’image est important, et « il faut faire avec ». Comme pour les prix littéraires qui boostent les ventes de livres, les palmarès d’universités vont influer sur les fonds publics et privés que recevront les établissements.

Nous ne reviendrons pas sur l’analyse critique que nous avons faite des palmarès, et notamment du classement de Shanghai[3].  Interrogeons nous plutôt sur la signification de la « course à l’excellence » qui accompagne cette floraison de classements internationaux aux critères fluctuants.

Le fait est qu’on entend beaucoup parler d’excellence en France (pôles d’excellence) comme dans d’autres pays (initiative d’excellence en Allemagne) ou à l’échelle européenne (centres d’excellence). Le rapport Aghion[4], fait à la demande de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, explore la problématique de l’excellence. Il y est beaucoup question « d’excellence académique » sans que ce concept soit clairement défini. Mais on nous dit : « conscients du risque de décrochage, l’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Union européenne ont mis en place des initiatives d’excellence qui présentent des caractéristiques communes : focalisation forte de financements pluriannuels sur l’excellence pour renforcer compétitivité et attractivité… ». Ceci renvoie à la « stratégie de Lisbonne » et à l’objectif de faire de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ».

 

 

 Dessin par Georges Waysand

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