Archive for décembre, 2013

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Pisa : la mobilisation des mathématiciens

Avertissement : Martin Andler est président d’Animath et la deuxième partie de cet article est parue dans Le Monde daté du 13 décembre 2013, dans un dossier intitulé  « L’Ecole française est-elle vraiment à la traîne ».

A-t-on déjà tout dit sur les leçons de l’étude Pisa[1] ? Les analyses ont porté, à raison, sur la manière dont notre système scolaire laissait plus de 20% des élèves sur le côté, sur son caractère très socialement inégalitaire, et sur la dégradation continue des résultats de la France depuis 2003. Mais a-t-on suffisamment prêté attention à trois aspects qui ne sont pas moins essentiels ?

I. Le constat

Rappelons que Pisa classe, dans chaque domaine étudié (mathématiques, sciences, maîtrise de la langue) les élèves en 7 niveaux, allant du niveau <1 (les moins bons) au niveau 6 (les meilleurs). La distribution entre ces niveaux est bien plus instructive que la seule moyenne.

1° Les mathématiques n’échappent pas au poids du déterminisme social, et c’est particulièrement marque en France : contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, l’origine sociale y est aussi déterminante que pour la maîtrise de la langue. Lorsque l’on compare les performances en mathématiques des 25% des élèves les plus favorisés, et celle des 25% des élèves les moins favorisés, l’écart pour la France est le plus marqué de tous les participants au cycle PISA 2012.

Globalement, les garçons sont légèrement meilleurs que les filles en mathématiques, et la différence entre les deux sexes est comparable en France à ce qu’elle est dans les pays de l’OCDE. On ne constate d’ailleurs aucune détérioration dans les dernières années. Mais la différence moyenne cache des disparités importantes : si les filles sont aussi nombreuses que les garçons parmi les très faibles (niveau ≤1), elles sont sensiblement moins nombreuses que ceux-ci parmi les forts (niveaux 5 et 6), avec 11% de filles et 15% de garçons, et à peine plus de la moitié au niveau 6 : 2,2% contre 4,1%.

3° Dernier point, qui n’est guère souligné : nous disposons d’un vivier insuffisant de jeunes préparés pour les études scientifiques. Dans l’enquête 2012 en mathématiques, nous avons 9,8% d’élèves au niveau 5 et 3,1% au niveau 6, ce qui nous place très loin de pays comparables comme l’Allemagne (respectivement 12,8% et 4,7%) ou la Belgique (13,4% et 6,1%), sans parler des pays d’Asie. En 2003, nous en étions respectivement à 11,6% et 3,5%, soit une sensible régression depuis lors. Et nos faibles résultats en mathématiques ne sont pas compensés par une qualité supérieure en sciences : il n’y a que 8,1% de jeunes français aux niveaux 5 et 6 en sciences, là aussi en dessous de la moyenne des pays comparables.

Ces jeunes aux niveaux 5 et 6 sont ceux qui sortent du collège bien préparés pour des études scientifiques. Or ils ne représentent qu’environ deux tiers des effectifs de la série S, qui doit donc inclure des élèves qui arrivent en première scientifique avec une grande fragilité de leurs acquis.

Pour ce qui est des vocations scientifiques, les jeux sont donc déjà faits à la fin du collège :

  • il n’y a pas assez d’élèves qui sont prêts pour suivre un cursus à dominante scientifique ;
  • parmi ceux qui peuvent s’engager dans un tel cursus il n’y a pas assez de filles ;
  • les jeunes des milieux défavorisés, en particulier ceux qui sont issus de l’immigration, en sont très largement exclus.

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