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Gloire à l’autonomie !

A ceux qui douteraient encore des talents de propagandistes des scribes de la rue Descartes, il faut recommander la lecture d’une brochure en couleurs publiée sur le site du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, et intitulée « Les bénéfices de l’autonomie des universités ». On nous y explique que tout baigne, que l’argent coule à flots, et que grâce à l’AUTONOMIE les universités font des miracles comme l’attestent les histoires édifiantes recueillies dans de nombreux établissements.

Un très vieux souvenir me revient alors : je pense à un voyage en Chine, où l’on nous chauffait les oreilles avec les bienfaits du régime maoïste, et où l’on nous distribuait quotidiennement des témoignages de petites gens à la gloire du grand timonier : « Grâce au président Mao ma famille mange à sa faim, j’ai des souliers en bon état… ».

Vous croyez que je radote ? Lisez la brochure. On y apprend que, depuis l’AUTONOMIE, les universités font du tutorat, installent des centres de ressources en langues, des salles de visioconférence, des bornes wifi sur les campus, des bureaux d’études doctorales, des ressources pédagogiques en ligne, des bureaux d’aide à l’insertion professionnelle où l’on apprend à faire un cv…  On n’imagine pas comme ils étaient primitifs dans les facs avant l’AUTONOMIE !

Mais que font-ils d’autre avec l’AUTONOMIE ? Ils créent des chaires d’excellence dans l’espoir d’avoir un nobélisable. C’est pas bête ça, pour remonter au classement de Shanghai ! Sinon, les promotions, les primes, les requalifications d’emplois, je vous dis pas comme ça pleut, même pour les BIATOS. Ils doivent tous être aux anges ! Pourvu que ça dure ! On aimerait avoir une information moins  anecdotique sur la nouvelle gestion des ressources humaines par les différentes universités, ses réalités et ses perspectives.

Par ailleurs, depuis l’AUTONOMIE, ça carbure avec les entreprises. Donnent-elles de l’argent aux fondations ? En tout cas elles ne semblent pas avoir de rancune à jouer les utilités dans les conseils d’administration. Il y en a même qui nouent des partenariats avec les universités - ça ne s’était jamais vu, je vous dis !

Et tous ces campus d’excellence qui seront « exemplaires en termes de qualité architecturale et environnementale », avec « une vraie vie de campus où scientifiques et étudiants se rencontrent en permanence et peuvent accéder à toute heure à tous les services dont ils ont besoin »… L’émotion me submerge !

En fait d’émotion, c’est plutôt la tristesse de voir traiter comme un sujet de basse propagande ce qui reste un grand enjeu. L’autonomie ne consiste pas à grappiller quelques miettes ici ou là. C’est une mutation considérable qui ne va pas de soi et qui n’a rien d’acquise pour l’instant. Essayer de la vendre comme un gadget ne peut que réjouir ses opposants irréductibles.